Brésil 1958 : un 4-2-4 révolutionnaire

La Coupe du monde 1958 verra l’arrivée d’un nouveau schéma tactique initié par le Brésil qui va conduire à une révolution du jeu. Focus sur la tactique du Brésil qui apportera en Suède un football novateur.

La sélection brésilienne va jouer en 4-2-4 avec un système qui sort des standards de l’époque. Dans les années 1950 les équipes évoluent en Pyramide avec un 2-3-5 ou en W-M avec un 3-4-3, formations utilisées depuis de nombreuses décennies. Le 4-2-4 va permettre au Brésil de stabiliser une équipe qui possédait une force de frappe offensive hallucinante, mais pouvait risquer de prendre l’eau en défense avec la formation Pyramide, trop offensive, ou le W-M qui aurait empêché le sélectionneur d’aligner Vava, Garrincha, Pelé et Mario Zagallo en même temps sur le terrain.

4-2-4

Le coach brésilien, Vicente Feola, fera le choix de jouer à quatre derrière, une stratégie défensive encore peu répandue. Durant les six matchs du tournoi, le sélectionneur va aligner Gilmar dans les buts, Hideraldo Bellini et Orlando Peçanha en charnière centrale, ainsi que Nilton Santos dans le couloir droit. Le poste de latéral droit sera confié pendant cinq matchs à Nilton De Sordi, mais ce dernier sera remplacé par Djalma Santos pour l’ultime match contre la Suède.

Gilmar va apporter un plus à sa défense en étant le premier relanceur. En effet, les défenseurs n’hésitaient pas à jouer en retrait avec leur gardien, pour qu’il se saisisse du ballon à la main, puis le dégage au pied vers ses attaquants. De nos jours, cette aide précieuse n’est plus permise, car il est interdit au gardien de se saisir du ballon avec les mains, après une passe de son défenseur.

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La charnière centrale permettra à Vicente Feola d’être serein derrière, mais elle lui permettra aussi de compter sur l’aisance technique du capitaine Bellini. Ce dernier va jouer un rôle de quasi-milieu de terrain sur les phases offensives du Brésil. Ce qui va permettre à la Seleçao de passer d’un 4-2-4 à un 3-3-4 quand le Brésil a le ballon, avec l’apport de Bellini au milieu, en soutien de Didi et de Zito. En défense, les trois défenseurs restants glissaient ensemble pour former une défense à trois avec Orlando au milieu accompagné de Nilton et Djalma Santos sur les côtés.

3-3-4

La solidité défensive du bloc brésilien sera visible tout au long de la compétition avec une défense qui résistera aux assauts de l’Autriche, l’Angleterre, l’Union Soviétique et le Pays de Galles. La sélection brésilienne finira avec la meilleure défense avec seulement quatre buts encaissés en six matchs. Un bilan comptable plutôt flatteur où les latéraux auront apporté leur contribution. A gauche Nilton Santos a offert un relais avec l’attaque très intéressant, jouant assez haut, il ne rechigné pas à faire les tâches défensives. Bien aidé par le travail de repli de Zagallo dans son couloir, il pouvait monté pour apporter le surnombre en attaque. Il se montrera décisif contre l’Autriche avec un but somptueux en une-deux avec Mazzola, ainsi qu’un centre millimétré à destination de Pelé en finale, avec comme résultat un des plus beaux buts du tournoi. Le latéral droit (De Sordi puis D.Santos) sera moins porté vers l’avant avec la présence de Garrincha qui va s’occuper des tâches offensives dans son couloir droit.

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Le milieu de terrain sera un maillon essentiel au dispositif de Feola. Avec Didi en organisateur du jeu, dans un rôle de milieu tout terrain, très impliqué dans les tâches offensives, le Brésil pourra compter sur une arme redoutable pour faire le lien entre la défense et l’attaque. A côté de lui se trouvera Dino Sani pour les deux premiers matchs, mais Feola décidera de titulariser le joueur de Santos, Zito, qui accompagnera le meilleur joueur du Mondial 58 pendant le reste du tournoi.

Les ailes seront animées par trois joueurs durant le tournoi. Le côté gauche sera réservé à Mario Zagallo qui va être précieux dans le schéma de Feola avec un rôle plus défensif que son opposé. Le joueur de Botafogo va jouer presque au niveau de ses milieux de terrain pour offrir une solution défensive supplémentaire, et pour combler le repli défensif moins présent de Vava, Pelé ou Garrincha. Mais sa qualité technique et sa vitesse feront de lui une arme redoutable en débordement, alors qu’il offrira une passe décisive à Pelé en finale.

L’aile droite sera acquise à Mané Garrincha, à partir du troisième match contre l’Union Soviétique. Avant lui c’était Joel Martins qui avait eu le rôle de dynamiter les défenses adverses, mais le choix de titulariser Garrincha sera évident au vu des performances de haut vol que produira L’ange aux jambes courbées – surnom de Garrincha. Dans son couloir droit, il va jouer un rôle déterminant pour ouvrir des brèches dans la défense adverse. Ses dribbles et ses démarrages incessants vont fatiguer ses vis-à-vis. Des accélérations fulgurantes qui vont lui permettre d’inquiéter à de nombreuses reprises le portier adverse comme contre l’URSS ou le Pays de Galles. Mais il va surtout se muer en passeur avec notamment deux passes décisives en finale contre la Suède.

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L’attaque sera aussi alimentée par des buteurs. Au départ c’est José Altafini dit Mazzola qui va se charger d’inscrire quelques buts (2 au total), mais une blessure contre l’Angleterre dans le deuxième match et le retour en forme de Pelé va le pousser sur le banc dans le dernier match de poule. Pelé va jouer un rôle d’électron libre derrière Vava, l’avant-centre. Son rôle offensif avec une liberté de mouvement presque totale va lui permettre de se faire oublier des défenses et rôder dans la surface pour inscrire 6 buts dans le tournoi. Un total presque identique pour Vava (5 buts) qui va faire très mal à ses adversaires avec ses appels en profondeur assassins, rendu possible par le positionnement de Pelé qui va attirer les défenses vers lui et faire monter le bloc adverse. Pas très grand avec ses 1m74, Vava va miser sur ses pieds plutôt que sa tête. D’ailleurs le jeu aérien ne sera pas privilégié par le Brésil devant le but, car sur les 16 réalisations de la Seleção, seul un but sera inscrit de la tête, avec le dernier but de Pelé en finale.

4-4-2 losange

Le Brésil sera aussi capable d’évoluer sur certaines phases de jeu en 4-4-2 losange avec Vava et Garrincha en pointe. Cette tactique permettra aux Brésiliens d’exploiter au mieux la relation entre Vava et Garrincha, laissant aussi beaucoup de liberté à Garrincha pour dribbler et Vava pour prendre la profondeur. Au milieu, le losange était formé, au sommet de Pelé en numéro dix, juste derrière lui, Didi et Zagallo se partageant le milieu, et derrière eux, Zito en sentinelle pour couvrir la défense.

Cette révolution tactique sera l’œuvre de Vicente Feola qui va donner du fil à retordre à ses homologues adverses. Changeant en permanence de formation sur le terrain, le Brésil va déstabiliser ses adversaires, forçant les défenses à s’adapter et à subir le jeu rapide et technique des Brésiliens. Un coup de maître tactique qui va révolutionner durablement le football, car les équipes vont commencer à abandonner le W-M ou le Pyramide pour adopter le 4-2-4.

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Pinterest.cl

Orlando Vinson

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